L’automne était souvent vue comme la saison la plus propice pour les rêveurs sentimentaux et nostalgiques pour se répandre en de longues tirades poétiques sur les changements de la nature, sa mort lente et sévère, mais aussi à l’apogée de sa beauté, se colorant de tons ocres, oranges et rouges. Et c’était à raison, puisque ce jour là, le plus rêveur des rêveur, Valentin Vlash, s’était perdu, tout éveillé, dans un merveilleux rêve rempli de feuilles dorées. Elles ruisselaient sous le soleil automnal, flirtant avec ses pas légers et insouciants. Il avait l’impression de voler, emporté par le vent, avec ces milliers de feuilles de toutes les couleurs. Il rêvait, sans se rendre compte qu’il était arrivé dans la cour intérieure de l’école, sans se rendre compte du jeune homme qui était là, recouvert de fleur. Il avançait simplement, aérien et souple, balançant le long de son corps ses longs bras terminé par ses longues mains aux longs doigts pâles, qui virevoltaient au rythme léger de sa marche efféminée.
Il chantonnait gaiement, sans paroles ni instruments, un air connu de lui seul, qui lui rappelait les temps anciens de son enfance, alors qu’il regardait les feuilles tomber de l’obscurité de la cave parentale, par sa minuscule lucarne, seule fenêtre sur la liberté. Il murmurait doucement cette mélopée, le regard hagard et perdu dans des cieux lointains, son œil unique fixé sur la voute céleste qui émanait un sublime soleil qui réchauffait l’air de cette après-midi paisible, au Val.
Mais alors qu’il rêvassait sans regarder où il mettait les pieds, marchant dans les feuilles mortes, il heurta sans le vouloir une bordure de béton, sur laquelle il trébucha sans y prendre garde, pour ensuite s’étaler de tout son long, froissant ses habits déchirés, et salissant sa chevelure immaculée.
Lorsqu’il sentit le sol heurter la face de son corps, il reprit conscience de l’endroit où il se trouvait. Alors qu’il se voyait dans une forêt roussissant sous l’influence de l’automne, il se rendit compte qu’il n’était nulle par d’autre que dans la cour de cette maudite école du Flux, et qu’il venait de méchamment se ramasser.
Il tenta de se relever, mais glissa malencontreusement, et retomba une nouvelle fois à plat ventre…
Après avoir poussé un soupir résigné, il se laissa aller dans cette position qui lui était forcée, attendant qu’un sort plus enviable lui apparaisse pour qu’il se débarrasse de cette gênante situation… Qui sait, l’altruisme était peut-être de mise, au Val, en cette saison…
Hélas ou heureusement, personne ne vint le secourir ou l'écraser, et il se contenta de se relever pour repartir vaquer à ses activités...